Hébergement des chevaux en groupe
L’hébergement traditionnel des chevaux au box requiert des qualités d’organisation et de rigueur de la part de l’hébergeur. L’hébergement des chevaux en groupe nécessite d’autres compétences d’observation et des connaissances sur les comportements sociaux des chevaux. Après avoir décrit l’organisation sociale à l’état naturel, nous aborderons l’apprentissage des comportements sociaux pour prendre conscience des «faibles aptitudes sociales» que peuvent générer des modes d’élevage très éloignés des conditions naturelles. Enfin nous expliquerons comment est né le concept d’écurie active et comment ce mode d’hébergement répond aux problématiques de l’hébergement en groupe.
Structure sociale des chevaux à l’état naturel
A l’état naturel, les chevaux vivent en groupes. La structure de base est le groupe familial composé d’un étalon (rarement deux ), de son harem de juments (généralement 1 à 3 femelles) et de leur descendance jeune et sub adulte. L’étalon protège son groupe familial des prédateurs et maintient à distance les autres mâles toute l’année pour pouvoir s’accoupler avec les femelles le moment venu. Les liens qui unissent les adultes d’un groupe familial sont forts. Le groupe de juments est très stable. Seul l’étalon peut changer en fonction de la pression des mâles célibataires alentours. Vers l’âge de 2-3 ans les jeunes quittent le groupe de leur propre chef. Les femelles, lors de leur 1er œstrus, rejoignent un autre groupe familial ou en fondent un nouveau avec un mâle célibataire. Les mâles quittent le groupe familial généralement vers 3 ans. Ils rejoignent des groupes de mâles célibataires dans lesquels ils continuent d’apprendre les comportements sociaux jusqu’à l’âge de 5 ans considéré comme la maturité sociale. Ils cherchent alors à prendre la place d’un chef de famille.
Au sein de chaque groupe, les relations entre individus sont régies par deux types de relations. Les relations de dominance qui s’exprime notamment pour l’accès aux ressources et les affinités entre individus qui s’exprime de façon plus subtile par la distance que les chevaux maintiennent entre eux, et les rares contacts tactiles que les chevaux peuvent avoir : flairages, frottements, grattages mutuels.
Très rarement, de vieux mâles passablement abimés lors de combats choisissent de finir leur existence de manière solitaire.
Dans ce contexte, il n’y a pas de sevrage à proprement parler et les jeunes grandissent parmi les adultes, ce qui leur permet d‘apprendre les comportements sociaux de façon complète et subtile.
Quels sont les enjeux aux yeux des chevaux?
Les enjeux importants aux yeux des chevaux demeurent simples. Le groupe social est la chose la plus importante, avant même de boire ou de manger. Ensuite, c’est l’alimentation qui occupe la majeure partie du temps puis, par nécessité, l’abreuvement qui nécessite parfois de longues marches mais aussi l’adhésion du groupe pour se rendre au point d’eau. Certains chevaux semblent devoir subir plus que d’autres de cet état de fait. Quand un seul cheval a soif, il ne va pas au point d’eau seul mais va devoir attendre que le groupe entier consente à se déplacer pour boire. Enfin, les abris lors de fortes chaleurs avec présence d’insectes ou lors de précipitations intenses font l’objet d’une certaine convoitise.
Importance de l’expérience sociale des chevaux
Il est important de noter ici que l’expérience sociale conditionne la maitrise des postures et séquences comportementales qui sont la base de la communication des chevaux entre eux. Ils sont aussi les signaux que nous humains observons pour comprendre le cheval. Par exemple, oreilles couchées, fouaillements de queue ou soulèvement d’un postérieur sont autant de messages d’alerte avant une morsure ou une ruade. Un cheval qui ne maitriserait pas la subtilité des différentes graduations de ces comportements taperait ou mordrait sans prévenir, il serait un cheval peu adapté à la vie en groupe et clairement dangereux pour l’homme.
Il est donc primordial pour la sécurité des personnes qu’un cheval grandisse avec une expérience sociale et notamment dans un groupe comprenant des chevaux adultes. En effet, on observe que l’agressivité des jeunes entre eux est beaucoup moins importante lorsque le groupe comprend des adultes. Les choses se passent un peu comme si les adultes remettaient les jeunes à leur place en leur expliquant qu’il ne faut pas se battre mais que l’on peut s’expliquer de façon plus subtile. Forts de ces connaissances, on remarque que de plus en plus d’élevages mélangent quelques adultes aux lots de poulains, 1 ans et 2 ans. Chevaux en retraite et poulinières vides trouvent là toute leur utilité pour produire des chevaux bien dans leur tête.
Comment est né le concept de l’écurie active?
L’écurie active est née de ce constat que le cheval est un animal social et que la vie en groupe est primordiale dans son équilibre mental et émotionnel. Les précurseurs de ce mode d’hébergement ont donc commencé par ouvrir les portes des boxes pour laisser les chevaux vivre ensemble.
Tant que l’on dispose de beaucoup de place, que les chevaux ne sont pas montés ou même manipulés, qu’ils se nourrissent à l’herbe toute l’année et qu’elle couvre parfaitement leurs besoins et seulement leurs besoins, cela ne pose pas de problème….. Mais voila, cette situation n’existe quasiment jamais et la conduite en groupe des chevaux génèrent un certains nombre de problématiques. Le concept de l’écurie active s’est élaboré et affiné au fil des expériences pour répondre aux questions que pose l’hébergement en groupe.
L’alimentation : Dans le groupe, chaque cheval a des besoins alimentaires propres en fonction de son âge, son gabarit, son état physiologique, le travail qu’il effectue etc. Pour coller aux besoins de chaque cheval individuellement sans subir les questions de dominance, il faut pouvoir isoler les individus pour au moins une partie de leur alimentation, c’est pour cette raison que le distributeur de concentrés avec reconnaissance individuelle a été intégré au système.
La base de l’alimentation du cheval reste le fourrage. Certains équidés, notamment ceux de races rustiques et de petit gabarit ne peuvent pas en disposer à volonté sous peine de surpoids et des pathologies qui y sont liées. Des distributeurs programmables de fourrage ont donc été créés pour adapter le temps d’accès au fourrage de qualité à chaque individu ou à l’ensemble du groupe.
Regroupés sur des espaces plus restreints, notamment en saison pluvieuse, les chevaux sollicitent fortement le sol. Pour qu’il ne se transforme pas en bourbier, il est traité avec des dalles drainantes pour disposer d’un sol sain, drainant et portant toute l’année. De cette façon, le propriétaire qui souhaite aller chercher son cheval ou juste passer quelques minutes avec lui peut y aller en chaussures sans se salir ou rester embourbé dans les sables mouvants des paddocks.
Enfin, on s’est rendu compte que s’ils ne sont pas sollicités, les chevaux ne font de leur propre chef pas suffisamment d’exercice quotidien. Leur mode de vie naturel leur a appris à marcher à l’économie et c’est ce qu’ils continuent de faire à l’état domestique. Il a donc fallu générer de la locomotion en attirant les chevaux par leur péché mignon : la gourmandise et en espaçant au maximum les points d’intérêt. Les écuries actives sont donc conçues en séparant au maximum l’abri du fourrage et du distributeur de concentrés pour que les chevaux marchent de l’un à l’autre plusieurs fois par jour. On constate que grâce à cet agencement, ils marchent environ 10 km quotidiennement.
D’autres améliorations techniques ont permis de gagner du temps et de réduire la pénibilité : Le replacement de la litière en paille par des matelas, la création de zones de toilettes pour regrouper les déjections ou le curage mécanisé sont autant de gains de temps et de propreté pour présenter une écurie toujours propre saine et accueillante.
Redonner au cheval des conditions de vie qui correspondent à ses caractéristiques comportementales est une demande de la société et d’un nombre de plus en plus important d’équitants propriétaires ou pas de leur cheval. L’hébergement des chevaux en groupe demande cependant quelques connaissances sur leur organisation sociale naturelle. Il est passionnant de connaitre ce qui est important pour eux afin de comprendre leurs motivations, évoluer en sécurité et anticiper leurs réactions. Cela permet également de leur proposer un cadre de vie qui leur convient vraiment. L’écurie active, concept en permanente évolution pour adapter les conditions d’hébergement au cheval et aussi aux cavaliers et aux soigneurs se base sur les connaissances scientifiques pour concevoir des aménagements et des équipements qui permettent à tous de vivre dans les meilleurs conditions.
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