Comment agencer autour des distributeurs de fourrage ?
La distribution du fourrage est le cœur de l’écurie active car c’est la zone la plus fréquentée. Afin que l’ambiance y soit zen et que les chevaux soient calmes et confiants, il est important de comprendre les bases des interactions sociales entre individus au sein du troupeau pour en déduire des stratégies d’aménagement que l’on pourra adapter à tous les types d’hébergement de chevaux en groupe. C’est évidemment la base des réflexions d’agencement dans l’écurie active.
Hiérarchie et affinités
Les éthologues (scientifiques) ont depuis longtemps établi qu’au sein d’un troupeau, deux types de relations entre les chevaux régissent leurs interactions sociales:
- Les relations de dominance
Elles s’expriment de façon assez facilement visible par des postures caractéristiques avec (pour simplifier) les oreilles couchées, des menaces de morsures et des menaces de ruades. L’issue de ces interactions est l’éloignement de l’un des individus. On qualifie alors le cheval qui s’est éloigné de subordonné par rapport à l’autre qui est qualifié de dominant. Cette relation ne vaut que pour cette paire d’individus car un cheval A dominant sur B peut tout à fait être subordonné à un 3ème cheval C. Ces relations de dominance sont en réalité bien plus complexes qu’il n’y parait. Il semble que suivant l’objet de la ressource, les relations de dominance peuvent différer au sein d’un même troupeau. Ces relations évoluent avec l’âge des chevaux et lorsque la composition du groupe évolue.
- Les relations d’affinité
S’exprimant de façon beaucoup plus discrète que les relations de dominance, l’affinité entre deux individus se caractérise par des comportements affinitaires plus fréquents (grattage mutuel, frôlements, contacts doux etc) ainsi que par une plus grande proximité spatiale. En observant régulièrement le troupeau, on remarquera que certains chevaux sont souvent assez proches au pâturage, au repos, etc. Trop souvent négligées, car peu spectaculaires, ces relations d’affinité peuvent poser problème lorsque l’on sépare certains individus. Ils peuvent alors exprimer de façon vive leur stress de séparation avec des vocalisations fréquentes et intenses ainsi qu’une agitation forte surtout lorsque le contact visuel avec le partenaire préférentiel est rompu.
Relations sociales distribution du fourrage
La compréhension de ces «règles sociales» qui régissent le troupeau est importante lorsque l’on raisonne l’agencement des zones de distribution du fourrage. En effet, chez le cheval, l’alimentation est le 1er poste du budget temps. Elle représente environ 65 % du temps. Lorsqu’en hiver, l’alimentation est basée sur le fourrage, l’espace autour des râteliers est donc particulièrement sollicité par les chevaux. Il faut bien comprendre qu’au sein du troupeau, les chevaux ne fonctionnent pas en tant qu’individu, mais en tant que sous-groupes affinitaires et qu’un groupe affinitaire de 2 ou 3 chevaux prend plus de place qu’un individu isolé. De même que deux groupes ne peuvent pas se croiser dans le calme dans des couloirs qui ne feraient que 5 ou 6 m de large, ils ne peuvent pas non plus circuler de façon sereine autour de râteliers installés dans des espaces trop exigus. Un accès suffisant au fourrage ainsi que des dégagements significatifs autour des râteliers sont donc indispensables.
Fournir assez de place(s)
Compte tenu du budget temps des chevaux vu plus haut, il est très fréquent de les voir ensemble autour des râteliers. Pour limiter le stress (observables par la fréquence des comportements agonistiques: menaces ou évitements) autour des râteliers, il est important de fournir assez d’accès au foin et de ménager plusieurs zones de distribution du foin plutôt qu’une seule. On recommande de fournir environ 2 passages d’encolure par cheval au sein des abris de distribution et en tout cas de ne pas passer au-dessous d’1.5 passage d’encolure par cheval. Cette donnée est théorique et il incombe à chaque détenteur de chevaux d’observer son troupeau pour définir s’il est assez calme autour du foin.
De même, il est important de multiplier les points d’affouragement pour éviter qu’un «dominant pénible» ne fasse la loi autour du râtelier et limite l’accès au fourrage aux chevaux en bas de l’échelle hiérarchique. 12 m entre 2 points d’alimentation est une bonne distance, car c’est d’expérience, celle que le dominant renonce à faire pour aller embêter ses congénères en train de manger au râtelier suivant.
Enfin, il est important de ménager des dégagements suffisants autour des râteliers. Pour des groupes de chevaux composés de plus d’une dizaine d’individus, nous recommandons d’aménager si possible des dégagements de 10 m autour des râteliers. On évitera en tout cas les dégagements de moins de 8 m tout autour des points de distribution du fourrage.
Coller ou pas le râtelier à la clôture
Un râtelier positionné en limite de clôture permet d’alimenter en fourrage sans rentrer dans le parc des chevaux. Cela constitue un gain de temps et de sécurité lors de la manutention du foin. Attention cependant à ménager suffisamment de dégagement pour que les chevaux subordonnés puissent éviter dans le calme et en sécurité les dominants. En effet, autour d’un râtelier, les chevaux peuvent s’éviter dans toutes les directions y compris en faisant le tour du râtelier. Si ce dernier ne comprend que 3 côtés accessibles, ces espaces de dégagement sont plus restreints. C’est pourquoi il faut absolument éviter de coller directement le râtelier à la clôture. On va plutôt faire l’aménagement suivant: le râtelier va être installé à 3 ou 4 m à l’intérieur du parc et on aménage à l’extérieur un couloir depuis la limite de clôture jusqu’au râtelier pour pouvoir l’alimenter. De cette façon, le cheval qui vient manger en limite du râtelier côté clôture dispose d’un espace de dégagement suffisant s’il a besoin d’éviter un dominant. Cela optimise à la fois la sécurité et le taux d’utilisation de tous les passages d’encolure de l’abri de distribution.
Un aménagement bien conçu permet à l’ensemble du troupeau de passer suffisamment de temps à manger du fourrage dans le calme. Il contribue donc directement au bien-être des chevaux et à leur sécurité. Dans le cadre d’une écurie active, les configurations et distances citées ci-dessus resteront les mêmes que la distribution soit en libre-service. En effet, les chevaux beaucoup de temps sur la zone de fourrage lorsqu’il est distribué avec des automates. Cela donne évidemment la flexibilité d’une alimentation individualisée.
L’autre point important dans les zones de fourrage est évidemment le sol qui va d’une part être très fortement sollicité et d’autre part recevoir la majorité des déjections du troupeau. Si cela représente un travail de nettoyage régulier, la concentration des crottins est également l’opportunité de mécaniser le curage et de réduire ainsi le temps et la pénibilité du travail.
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